Journal indexed in CEEOL, EBSCO, and Index Copernicus
Maria Magdalena Székely | p. 151–182

Étienne le Grand et le monastère de Bistrița

Abstract

Le point de départ de la recherche est la question: pourquoi Alexandre, fils du prince Étienne le Grand (1457–1504), héritier du trône († 1496), n’a pas été enterré dans la nécropole dynastique de Poutna, édifiée par son père ? Pour répondre, l’auteur analyse, d’une part, le statut d’Alexandre dans la hiérarchie du pouvoir en Moldavie et, d’autre part, le statut du monastère de Bistrița, où il a été enterré. Au moment de sa mort, le fils d’Étienne le Grand avait sa propre cour à Bacău, où il avait construit une église, avait ses propres officiers et fonctionnaires, entretenait sa propre correspondance et portait le titre de «Io Alexandre voïvode, fils d’Étienne voïvode, prince de Moldavie». Alexandre n’était donc pas un simple héritier du trône, mais bénéficiait d’un statut privilégié, très particulier. Pour souligner ce statut, il fallait un enterrement exceptionnel, dans un lieu prestigieux. Mais, comme Saint-Denis en France, le monastère de Poutna avait été conçu dès le début comme un lieu de mémoire, commémorant la nouvelle ligne de succession et glorifiant ses symboles, et non pas comme une église de famille, où l’on enterre tous les descendants et parents, par le sang et par l’alliance, des hommes et des femmes. Poutna, avec son espace funéraire hiérarchisé d’une manière très claire, était destiné à abriter les cendres de son fondateur et des princes qui devaient lui succéder, ainsi que les cendres des leurs épouses et peut-être des enfants de sexe masculin, morts en bas âge. Alexandre ne faisait partie d’aucune de ces catégories. Il n’était pas seulement fils de prince, mais ni prince à part entière, parce qu’il n’avait pas été couronné. Pour lui, il était nécessaire un autre lieu de sépulture. Et ce lieu fut le monastère de Bistrița, le «mausolée de la dynastie», construit par son arrière-grand-père, le prince Alexandre le Bon (1400–1432), et où ce dernier était lui-même enterré. Par l’enterrement d’Alexandre à Bistrița, ont été visées, par une subtile stratégie de mémoire, une réunion du sang princier, un ancrage dans la mémoire dynastique, une affirmation de l’origine, une attestation de la filiation, un éloge de la parenté, en soulignant la continuité dynastique, l’existence d’une seule famille régnante en Moldavie et l’unité indissoluble entre ses membres, vivants et morts.

L’auteur se penche également sur la construction à Bistrița, par Étienne le Grand, d’une tour avec une chapelle dédiée à Saint-Jean le Nouveau, le saint dynastique dont les reliques avaient été portées en Moldavie par Alexandre le Bon lui-même. Il y a aussi des commentaires sur la «galerie des ancêtres» peinte à Bistrița et sur les fragments de vêtements découverts par les archéologues dans un tombeau et que l’auteur croit avoir appartenu à Alexandre.


Keywords

Bistrița, dynastie, Étienne le Grand, mémoire, Poutna



Article from the journal
The Annals of Putna, IX, 2013, 1


 
The cover of the journal The Annals of Putna, IX, 2013, 1